Dehors les chiens, le infidèles - Maïa Mazaurette
Dehors les chiens, les infidèles
Maïa Mazaurette
Edition : Gallimard
Collection : Folio SF
Date de parution : septembre 2010
Nombre de pages : 442
Résumé : Quatre-vingts ans après la défaite des forces de la Lumière face aux Ténèbres, le monde ne connaît plus que la nuit éternelle. Seul espoir de voir un jour se lever le soleil : la Quête. Tous les cinq ans, un groupe de cinq adolescents spécialement entraînés part à la recherche de l'Etoile du Matin, arme légendaire, seule capable de lever la malédiction divine qui frappe l'humanité.
Avis : Et un autre partenariat au compteur. J'essaie de freiner un peu ces temps-ci, niveau lecture, étant donné le travail qui lentement me submerge (merci les profs hein, à croire qu'ils s'imaginent que leurs étudiants sont capables de bosser trente heures sur vingt-quatre...). Du coup je suis une grosse frustrée en ce moment (ça serait dommage que je finisse sous anti-dep' pour cause de manque de lecture quand même...), heureusement du coup que je tombe sur de très bons ouvrages. Et vous savez quoi ? Si vous avez à peu près suivi mes chro précédentes, vous n'aurez aucun mal à deviner ma position vis-à-vis de ce livre :p Pour cet ouvrage, encore une auteure française (je sais, je fais la remarque à chaque fois mais c'est tellement bon, surtout quand on voit la part de marché que prennent les productions pâlottes d'outre-atlantique...), encore une couv' canon, encore un texte de qualité, et surtout pas du tout comme les autres.
Le début du récit jette le lecteur au milieu de l'action et le force à rapidement s'immerger dans le monde que nous propose l'auteure. Un monde sombre, déliquescent, avec sa manière de fonctionner. Ici, la composition des habitants se fait sur la base d'une dualité. D'un côté, un peuple dévoué à Dieu, qui cherche à reconquérir la lumière perdue presque un siècle plutôt lors de la défaite de ses troupes, en retrouvant l'arme de Galaad : l'Etoile du Matin ; de l'autre, les troupes des ténèbres, satanistes, méchantes, sales et portées sur le Mal. Héhé, dit comme ça, je suis sûre que certains auront envie de partir en courant (d'ailleurs au vu du résumé, j'aurais presque fait de même). Du cliché, des tout gentils super beaux et vertueux contre des tout vilains moches et méchants.
Sauf que, et c'est justement ce qui fait que cet ouvrage est une pure réussite à mes yeux, ce côté manichéen ne ressort pas du tout pendant la lecture. Au contraire, j'ai bien l'impression que Maïa Mazaurette a exprès intégré ces éléments tout à fait classiques pour proprement les contredire tout du long. Outre le fait que nos héros - Spérance, la Guide, Astasie, Vaast, Lièpre et Cyphérien, ses Quêteurs – soient non seulement attachants, mais en plus dotés d'une réelle personnalité, ceux-ci sont également mis en scène de manière à ce que le lecteur se pose des questions à travers eux. L'intégrisme religieux en prend salement dans la tronche, le manichéisme et les clichés fantasy également.
Autre point tout à fait positif : la religion justement. Il faut dire que Dehors les chiens, les infidèles, est un bouquin vraiment étrange de par le fait que le lecteur ne sait jamais trop où le situer. Il n'est nulle part précisé que l'histoire se passe sur Terre, mais en même temps, à la façon dont on retrouve des éléments de fonctionnement familiers, on se demande parfois si on n'est pas dans une espèce d'uchronie, surtout à cause justement de la religion omniprésente, et plus particulièrement du catholicisme. Et malgré le fait que les détails soient fidèles à notre réalité à nous, lecteur, l'auteure s'en sert pour faire de son récit un récit fantastique. En fait, toute la part de magie vient des miracles de Dieu. Aussi déstabilisant soit-il, ce point est d'autant plus appréciable qu'il est vraiment utilisé et mis en scène de manière à servir l'histoire de façon intelligente.
Enfin, Mazaurette nous dépeint une guerre, une vraie, pas une de celles que l'on peut suivre dans un Gemmell un Lackey ou un Scholes où les combattants s'échangent des politesses et cui cui les p'tits zoiseaux, en dix lignes c'est expédié, les gentils gagnent avec honneur et droiture, les méchants meurent – et proprement s'il-vous-plaît – et tout est pour le mieux dans le meilleur, etc, etc. Non, ici, pas de spectaculaire, pas de passage épique ; sans pour autant que la narration vire dans le malsain, la guerre nous est présentée d'une manière immonde, sale, écoeurante, un moment où méchants et gentils se confondent, où la sensation de gâchis et de stupidité se fait plus que jamais ressentir.
Bref, en dehors de quelques très rares longueurs, n'ayons pas peur des mots, Dehors les chiens, les infidèlesest vraiment un ouvrage excellent ; intelligent, plaisant, et tout ce qu'il y a de moins convenu. C'est vraiment ce genre de fantasy que j'apprécie, et cet ouvrage, très sincèrement, malgré son résumé qui m'a valu les moqueries de mes gentilles colloc' ( :D ), je vous engage à vous jeter dessus. C'est vraiment du bon, et ça fait du bien.
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